Les fleurs du mal - Baudelaire

Fiche d'identité de l'auteur
Baudelaire Fiche d'identité mes fiches pratiques
Prénom & Nom : Charles BAUDELAIRE
Date et lieu de naissance : 1821 à Paris
Date et lieu de décès : 1867 à Paris à l'âge de 46 ans
Profession : Poète, journaliste, critique
Nationalité : Française
Genre : poésie
Mouvement littéraire : symbolisme, précurseur de la modernité poétique
Siècle : XIX°
L'oeuvre à étudier : Les Fleurs du Mal

Baudelaire, était le fils de d'un aimable sexagénaire disciple des philosophes et amateur de peinture. Sa mère, veuve en 1827, se remarie l'année suivante avec le commandant Aupick, futur général, ambassadeur et sénateur sous l'Empire. L'enfant, révolté par ce mariage, il ne s'entend pas avec son beau-père, est mis en pension à Lyon, puis au lycée Louis-le-Grand. C'est un élève cynique, singulier, qui éprouve de "lourdes mélancolies", un "sentiment de destinée éternellement solitaire".

Bohème

À l'âge de 28 ans et pendant trois ans, Baudelaire mène au quartier latin la vie dissipée de la Bohème littéraire. Il lit beaucoup, devient ultra-romantique et disciple de GAUTIER.

Voyage

Pour l'arracher de cette vie "scandaleuse", sa famille l'embarque à Bordeaux sur un voilier en partance pour les Indes (1841). Baudelaire n'ira pas loin que l'île Bourbon et sera de retour au bout de dix mois. Ce voyage enrichit sa sensibilité, l'éveille à la poésie de la mer, du soleil, de l'exotisme.

Dandysme

Dès son retour, Baudelaire exige sa part de l'héritage paternel et se lance dans l’existence dorée de la Bohème riche selon son idéal du Dandysme. Cette élégance matérielle n'est "qu'un symbole de la supériorité aristocratique de son esprit".
Il se lie avec la mulâtresse Jeanne DUVAL, la Vénus Noire. C'est la période la plus heureuse de son existence. Mais sa prodigalité menace déjà son patrimoine. Sa famille lui impose un conseil judiciaire qui le limite à une rente mensuelle de deux cents francs (1844) : désormais il vivra misérablement.

Activité littéraire

Baudelaire se consacre d'abord à la critique d'art : il va s'imposer comme un des maîtres du genre. La politique l'accapare quelque temps au moment de la Révolution de 1848. Il fonde un journal, publie des articles violents ; mais cette ardeur s'évanouit et il revient vite à la littérature.
Depuis 1846 - 1847 il a découvert l'oeuvre de l'américain EDGAR POE en qui il salue un esprit frère du sien, mystérieusement accordé avec son génie et son destin. Il entreprend avec ferveur de traduire ses Contes, dont la publication se poursuivra jusqu'en 1855.
De temps à autre pourtant, quelques poèmes de BAUDELAIRE trouvent dans diverses Revues et de 1852 à 1855, son activité de poète se trouve stimulée par l'adoration  quasi-mystique qu'il voue à Mme SABATIER.
Le recueil des Fleurs du Mal, mûri depuis tant d'années, paraît en fin en 1857. Baudelaire est aussitôt condamné en correctionnelle pour immoralité. Il s'empresse de remplacer les six poèmes incriminés et publie une Seconde Édition, enrichie de 35 pièces nouvelles (1861). 
Mais miné par la maladie, abusant de l'opium et du hashich, il est contraint de produire avec une activité fiévreuse de quoi alléger les dettes qui l'écrasent.

Exil volontaire

En 1864, il s'exil en Belgique avec l'espoir d'une fructueuse tournée de conférences. Mais il végète à Bruxelles, s'obstinant à écrire quelques Poèmes en Prose, et résolu à rentrer en France que "glorieusement".

La mort

Abattu par la crise en mars 1866, il est transporté à Paris, aphasique, à demi paralysé, et meurt en août 1867.

Fiche d'identité de l'oeuvre
les fleurs du mal Baudelaire mes fiches pratiques
Titre de l'oeuvre : Les Fleurs du Mal 
Auteur : Baudelaire
Date de publication : 1857
Date de remaniement : 1861
Forme littéraire : la Poésie
Genre et registre : poétique, lyrique
Mouvement littéraire : romantisme, parnasse, symbolisme
Siècle : XIX°
Le recueil compte dans la seconde édition 129 poèmes. S'opposant aux poètes illustres qui ont choisi "les provinces les plus fleuries du domaine poétique", Baudelaire se propose "d'extraire la beauté du Mal".
À travers sa propre expérience, le poète a voulu retracer la tragédie de l'être humain, souvent dissimulée sous une fausse pudeur. Créature déchue et objet d'un perpétuel conflit entre le Ciel et l'Enfer qui, en dépit d'un apparent désordre, explique la composition secrète du recueil. 

Résumé de l'oeuvre:
Ces vers du "Voyage" éclairaient à eux seuls l'entreprise du poète. Esprit vagabond, toujours mobile, Baudelaire explore les dédales de la conscience. Il atteint tantôt à l'extase, tantôt se perd dans les abîmes du péché. À travers ses poèmes, il nous fait partager le drame qui se joue en lui et qui n'est autre que la tragédie humaine."Plonger au fond du gouffre, Enfer ou Ciel, qu'importe ? / Au fond de l'inconnu, pour trouver du nouveau !"
Baudelaire, premier poète moderne, donne à la poésie sa véritable dimension : exprimer, par-delà les mots, ce vertige absolu qui s'empare de l'âme. Tout chez lui affirme la nécessité de la souffrance, la fatalité du péché. Tout traduit en lui une âme profondément troublée mais charitable. Baudelaire fait des Fleurs du Mal un immense poème de la vie et du monde.


Thèmes baudelairiens:
thèmes baudelairiens mes fiches pratiques image pixabay
Entrer dans l'épaisseur des Fleurs du Mal 
à la recherche des obsessions baudelairiennes
  • Le paradis perdu (l'enfance, l'âge d'or, la vie antérieur)
  • Ailleurs (l'évasion par les sens, le voyage sentimental, le vin, le "rêve parisien", la mort)
  • Le spleen (la monnaie de l'idéal, de la mélancolie au spleen, la fuite du temps,le gouffre)

Le paradis perdu

L'enfance

Baudelaire, même dans les phases les moins optimistes de sa vie, ne croyait pas que l'enfance fût un paradis tout à fait perdu. Il a tout de même évoqué le souvenir de l'enfance heureuse (avant le remariage de sa mère).  Il est bien conscient d'être seul  à estimer à son prix le paradis perdu.
  • Moesta et errabunda

L'âge d'or

La vision païenne d'un monde ignorant du péché peut étonner dans le contexte des Fleurs du Mal, qui est celui d'un monde fondamentalement marqué par le péché. Il ne faudra pas trop chercher l'explication dans l'évolution de la pensée de Baudelaire, car en ce cas le poète aurait plus tard rejeté de son livre ces éléments hétérogènes. Or les poèmes de cette veine signifient par le contraste qu'ils provoquent.
Mais on devine une explication plus profonde. Si la beauté, l'harmonie et la force étaient à l'origine du monde, c'est que les choses n'ont pu ensuite que se dégrader. Et le mythe passéiste (qu'il le situe ou non dans un contexte païen) s'oppose très exactement du mythe du progrès, que Baudelaire n'a cessé de pourfendre.
  • J'aime le souvenirs de ces époques nues
  • La géante

La vie antérieur

Baudelaire est habité par une mémoire libérée de la chronologie, en quelque sorte intemporelle. Et précisément l'abondance de ces souvenirs n'est concevable que dans la mesure où le poète a vécu d'autres existences.
D'autres existences, mais des existences heureuses. Cette précision, qui ne va pas de soi, est ici capitale. La réminiscence baudelairienne, comme celle de Platon, est liée à l'idée d'un bonheur ancien, puisé aux sources de l'âme et où l'âme aspire naturellement à retourner. 
  • Spleen (J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans)
  • La vie antérieure

Ailleurs

Si le poète aspire à un autre monde, c'est que ce monde-ci n'est pas sa patrie véritable. L'âme ici-bas est en exil, d'où l'importance du thème de l'exil chez Baudelaire : exil d'Andromaque, exil du cygne, exil de l'albatros qui est l'exil même du poète. La recherche d'un ailleurs traduit donc l'aspiration à la patrie véritable, aspiration tantôt paisible, tantôt furieuse, any where out of the word, n'importe où hors du monde. De cette tendance il résulte que chez Baudelaire toute recherche est en même temps une évasion. 

L'évasion par le sens

Dans les Fleurs du Mal l'amour sensuel est tout entier contenu dans le cycle de Jeanne Duval. Dans ce cadre il y a place pour des tons divers et des inspirations bien différentes, comme le reproche, le remords, la colère. La grande originalité de Baudelaire, c'est de faire partir son imagination du sens de l'odorat. Ainsi, l'image traditionnelle (chevelure = forêt) est elle-même renouvelée, amplifiée à l'extrême par l'adjectif aromatique. En somme la prédominance de l'odorat favorise la fusion de tous les sens, conformément à la doctrine des correspondances et le parfum entêtant des noires tresses conduit, dit le poète, à 
Un port retentissant où mon âme peut boire
A grands flots le parfum, le son et la couleur 
  • Parfum exotique
  • Chevelure

Le voyage sentimental

Le cycle de Marie Daubrun fait succéder, mais sur un tout autre registre, l'amer au doux et le doux à l'amer. C'est là où résonne le mieux la note heureuse, c'est encore dans la recherche d'un "ailleurs". L'origine et la clé du poème se situent, non plus dans une chevelure, mais dans les yeux verts de Marie. Leur éclat voilé suggère au poète un paysage nordique, lumineux et humide. Une harmonie rêvée par le poète entre des yeux de femme et un paysage, entre un état d'âme et un rythme, le rythme impair auquel on doit cette exceptionnelle réussite.
  • Invitation au voyage

Le vin

Le vin n'a pas, dans les Fleurs du Mal, la place qu'on imaginerait volontiers. De l'ivresse vulgaire à l'exaltation dionysiaque. Il permet plutôt l'évasion, d'échapper au monde réel. D'autres poèmes du cycle du vin expriment joie, réconfort, apaisement. Baudelaire vante le vin pour l'accès qu'il offre au monde du rêve.
  • Le vin de l'assassin
  • Le vin des amants

Le "rêve parisien"

Si toute évasion hors du réel aboutit au rêve, le rêve parisien possède un caractère bien particulier et touche à des aspects essentiels de la pensée et de la sensibilité de Baudelaire. C'est le rêve d'un architecte urbaniste qui bannirait de sa composition tout élément naturel pour savourer la monotonie enivrante, du métal, du marbre et de l'eau. Plus d'arbre donc, plus rien de vivant : tout serait conçu selon la géométrie de l'esprit. Une lumière certes mais qui ne devrait plus rien au soleil. Nul doute que pour Baudelaire le mérite de l'art soit de s'évader de la nature " La première affaire d'un artiste est de substituer l'homme à la nature et de protester contre elle" Baudelaire au Salon de 1846.
  • Le rêve parisien

La mort

Si l'homme est tenté par le voyage, c'est qu'il a besoin d'un ailleurs. Mais trouveras-t-il ce qu'il cherche ? Non, puisqu'il ne saurait découvrir que ce qu'il porte en lui. Et le spectacle du monde est d'une navrante uniformité. Les paysages les plus réputés sont illusoires car c'est notre imagination qui les crée, et notre imagination se passe fort bien du voyage. Quant aux sociétés humaines, partout le tyran est cruel et jouisseur, partout l'esclave est vil. Il est vain de chercher des différences : toutes les civilisations, tous les régimes politiques, toutes les religions se valent et valent ce que vaut une humanité corrompue. Tout voyage terrestre n'est qu'agitation et divertissement. La seule évasion possible, c'est la mort.
  • Le Voyage

Le spleen

La monnaie de l'idéal

L'importance n'est pas que, peu avant 1860, Baudelaire ait été obsédé par les formes des nuages, mais qu'il ait eu lui-même conscience du caractère régressif de son alchimie.
Quand, dans ce processus, la chronologie confirme l'ordre logique des Fleurs du Mal, ces phénomènes sont tout à fait convaincants. On  ne saurait prétendre que cette concordance soit vérifiable dans tous les cas. Il suffira alors de constater, chez Baudelaire, une ambivalence qui paraîtra assez conforme à sa pensée dualiste. Mais sans doute y a-t-il entre spleen et idéal plus qu'un rapport d'antinomie. L'impuissance à atteindre l'idéal provoque de plus en plus de retombées. C'est la quête de l'essence qui rend au poète l'existence de moins en moins supportable.
  • Alchimie de la douleur

De la mélancolie au spleen

Spleen en anglais signifie rate. La mélancolie ou bile noire passait par une sécrétion de la rate, selon la théorie médiévale des humeurs. Les deux mots sont donc, en principe, équivalents. 
Le spleen baudelairien trouve aisément sa place dans la lignée du dégoût de l'existence du poète latin Lucrèce, de l'ennui pascalien, de l'angoisse de Kierkegaard et de la nausée de Sartre.
Un contraste très marqué, est par l'image et par le rythme. Quelques mots (ennui, angoisse) donnent le ton philosophique. Les images suggèrent par leur nature et leur succession quelque chose d'oppressant, soit dans un registre réaliste (couvercle), soit par l'emprunt qui a été fait à l'arsenal du romantisme flamboyant (chauve-souris, araignées), mais avec un pouvoir de prolifération étonnant. Couvercle, cachot, barreaux (avec la pluie comme inévitable accompagnement du spleen) : nous sommes bien enfermés. Alors éclate l'obsession furieuse, d'abord sonore, puis visuelle. L'image finale du drapeau noir est à la limite de la caricature, mais cette fois la limite n'est pas franchie. Le registre reste grave, tragique. Avec cet assemblage de mots, d'images, de rythmes, sont nés à la fois un style et un concept, qui appartiennent à Baudelaire à jamais.
  • Chant d'automne
  • Spleen

La fuite du temps

Le sentiment de la fuite du temps, c'est un très vieux thème chez les poètes, et il a été l'objet à l'époque romantique d'une orchestration prestigieuse. Mais du romantisme élégiaque à L'horloge le fossé est cette fois infranchissable. Le rythme du poème est implacable : à l'irrémédiable fuite du temps, Baudelaire associe les remords de tous ordres et l'obsession de sa vie manquée. L'idée que le désespoir trouve dans son expression même une compensation esthétique ne nous vient pas à l'esprit dans le cas de L'horloge. 
  • L'horloge

Le gouffre

Le sentiment du gouffre naît de la confrontation entre la conscience de soi et l'Infini des Nombres qui partout la cerne et la menace. Le mal est donc à la racine même de l'être. Il consiste dans l'impossibilité de concilier la soif d'absolu et les limitations de l'existence individuelle. Baudelaire souhaite abolir son propre moi, comme étant la source de la douleur.
Comme Caïn après la faute, le poète des temps nouveaux est interdit de séjour au royaume des justes, il est condamné à errer sans but, à tourner en rond dans sa cage. Il se fait chercheur d'un absolu qui n'est plus derrière lui, mais devant lui, car il doit le réinventer tout en sachant que celui-ci s'éloignera toujours plus, comme le mirage se forme puis se dissipe sous les yeux de celui qui meurt de soif dans le désert. 
La recherche de son identité fonde sa singulière aptitude à puiser dans son mal de vivre sa raison d'être. L'expérience baudelairienne vérifie le paradoxe pascalien que l'homme tire sa grandeur et sa misère, sa force et sa faiblesse.
  • le gouffre
Cet article contient des textes des ressources ci-dessous.



Ressources :
XIXe siècle Collection Littéraire LAGARDE & MICHARD
Baudelaire - Les Fleurs du Mal - Édition de Claude Pichois - Folio classique
Profil d'une oeuvre 21 Les Fleurs du Mal par Georges Bonneville - HATIER